
COP15 : l’accord pour protéger la biodiversité
La COP15 vise à adopter un axe stratégique mondial pour la préservation de la biodiversité en voici les retours.
Initialement prévue à Kunming en Chine en 2020, la COP15 s’est finalement déroulée à Montréal en cette fin d’année 2022 pour des raisons sanitaires.
Les COP Biodiversité ont lieu tous les 4 ans, et ont pour objectifs la conservation de la diversité biologique, l’utilisation durable de la diversité biologique et le partage juste et équitable des avantages découlant de l’utilisation des ressources génétiques.
En 2019, L’IPBES (Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques) soumettait un rapport estimant que 75% des milieux terrestres et 66% des milieux marins étaient « sévèrement altérés » par les activités humaines. Il soulignait également la disparition, en moins de 50 ans, de deux tiers des effectifs de plus de 20 000 populations de mammifères, d’oiseaux, d’amphibiens, de reptiles et de poissons. L’IPBES lançait une alerte : « La nature décline globalement à un rythme sans précédent dans l’histoire humaine – et le taux d’extinction des espèces s’accélère, provoquant dès à présent des effets graves sur les populations humaines du monde entier ».
Devant l’urgence grandissante de la perte de la biodiversité, l’objectif général de cette dernière COP était d’enrayer et d’inverser le déclin de la biodiversité, afin de contribuer à la “vision à 2050 de vivre en harmonie avec la nature”.
Les principaux objectifs de ce nouvel accord
Le cadre de « Kunming-Montréal » a abouti à une série de 23 objectifs pour 2030. Parmi ces objectifs, on peut citer :
- La protection de 30% des surfaces (marines, côtières, terrestres, et d’eaux douces) de la Terre au niveau mondial. Il s’agit d’un attendu phare de cette COP. En complément de ce point, il est ciblé de réduire la perte des zones de forte importance pour la biodiversité à « proche de zéro » et restaurer « au moins 30 % » des espaces marins et terrestres dégradés.
- La réduction des subventions néfastes pour la biodiversité à hauteur de 500 Md$/an (notamment au niveau de l’agriculture conventionnelle) et la mobilisation de 200 Md$/an en faveur de la biodiversité (au moins 25 Md$/an en 2025 et 30 Md$/an en 2030 à destination des pays du Sud).
- La réduction d’au moins 50% des risques liés aux pesticides et produits chimiques issus de l’agriculture. Les acteurs de l’agriculture, l’aquaculture, la pêche, et la foresterie sont invités à une « gestion durable » de leurs activités.
- Les institutions financières et entreprises sont également encouragées à évaluer et rendre public leurs impacts sur la biodiversité.
- La réduction de 50% du taux d’introduction d’espèces envahissantes.
Le texte reconnaît également les droits et l’importance des peuples autochtones considérés comme les « gardiens de la biodiversité » : ces peuples gouvernent et gèrent 25% de la surface terrestre, qui concentre presque 80% de la biodiversité.
Autre question soulevée : le partage équitable des bénéfices issus des ressources génétiques entre pays du Nord et pays du Sud. Un premier accord a été acté mais le mécanisme reste à déterminer lors de la prochaine COP.
Qu’est-ce que cela veut dire pour les entreprises ?
Dans l’ensemble de l’accord de Kunming-Montreal, on note d’abord clairement l’objectif qui prévoit le reporting des entreprises et les encourage à évaluer et rendre publics ses impacts et dépendances vis-à-vis de la biodiversité.
Les autres objectifs sont encore peu détaillés sur l’implication des entreprises. On peut relever notamment qu’elles devront :
- limiter les zones d’activité en se conformant aux zones protégées.
- réduire drastiquement leurs impacts négatifs liés aux pollutions, notamment les pollutions plastiques et chimiques.
- compenser la réduction de subventions nuisibles à la biodiversité.
Indirectement, les entreprises auront également un rôle à jouer pour :
- encourager les citoyens à faire des choix de consommations durables (sur les enjeux de surconsommation ou de gaspillage), en revoyant leurs approches marketing.
- participer à la restauration écologique des 30% de terres et mers dégradées, afin de générer des gains de biodiversité. Il est d’ailleurs prévu la mise en place de mécanismes innovants tels que les crédits ou certificats biodiversité pour mesurer leur contribution positive.
Plus spécifiquement, les entreprises du secteur agricole et les industries agroalimentaires sont concernées par des objectifs spécifiques qui visent à réduire de 50% les risques liés aux excès de nutriments et l’utilisation des pesticides.
Les entreprises de l’agriculture, de l’aquaculture, la pêche et la sylviculture devront également gérer leurs opérations de manière durable et augmenter le recours à des pratiques respectueuses de la biodiversité.
Le secteur de la construction, du bâtiment, de l’aménagement seront acteurs dans la réintroduction de la nature dans la ville. L’augmentation en milieu urbain devra être significative.
Un accord historique ?
Cette COP15 a été relayée comme historique et comme l’équivalent des accords de Paris de la COP21 avec son objectif emblématique de réduction de la température du climat mondial à 1,5°.
Le cadre, signé massivement par 195 états, représente une avancée considérable au niveau mondial.
Cependant l’accord semble décevant pour certains pays du Sud qui demandaient un financement bien plus important que celui accordé. Certains ont aussi pointé du doigt une prise de décision finale « passée au forceps ».
Enfin, certains acteurs de la transition écologique jugent les objectifs portés par ce texte comme encore trop évasifs, imprécis mais aussi pas assez ambitieux.
Autre fait soulevé, les « Accords d’Aichi », objectifs adoptés lors de la COP10 en 2010 au Japon, n’ont pas été respectés.
Devant cet échec constaté, les enjeux sont encore plus conséquents pour la prochaine COP, qui aura lieu en 2024 en Turquie.
Sources :
- Le monde – COP15 : à Montréal, des engagements historiques pour la biodiversité
- Carbone 4 : COP15 biodiversité : un accord historique, mais imprécis et non-contraignant
- Vert – le décryptage
- Blooming – Accord de Kunming-Montréal : quels enjeux pour les entreprises à l’issue de la COP15 ?